Le pape François affirme que « l’opposition entre les générations est une duperie et un fruit empoisonné de la culture de l’affrontement ». Il estime que « monter les jeunes contre les personnes âgées est une manipulation inacceptable ».
C’est ce que le pape écrit dans un message publié ce mardi 14 mai 2024 à l’occasion de la 4e Journée mondiale des grands-parents et des personnes âgées qui sera célébrée le 28 juillet prochain.
Le pape dénonce « une fausse conviction, très enracinée dans certaines cultures locales, qui engendre l’hostilité envers les personnes âgées soupçonnées de recourir à la sorcellerie pour ôter des énergies vitales aux jeunes ». Dans ces cultures, explique-t-il, « en cas de mort prématurée, de maladie ou de sort malheureux touchant un jeune, la faute est rejetée sur une personne âgée ». Le pape invite à combattre cette conviction : « Cette mentalité doit être combattue et éradiquée, écrit-il. Elle est l’un de ces préjugés infondés, dont la foi chrétienne nous a libérés, qui alimente un conflit générationnel entre jeunes et personnes âgées. »
Il réfléchit aussi sur une « accusation adressée aux personnes âgées de “voler l’avenir aux jeunes” » : c’est une accusation qui « est très présente aujourd’hui partout », aussi « dans les sociétés les plus avancées et les plus modernes ». En tant qu’exemple, le pape François cite « la conviction que les personnes âgées font peser sur les jeunes le coût de l’assistance dont elles ont besoin ». Pour le pape, « il s’agit d’une perception déformée de la réalité ». « C’est comme si la survie des personnes âgées mettait en danger celle des jeunes; comme si, pour favoriser les jeunes, il fallait négliger les personnes âgées ou même les supprimer », écrit-il.
Pour illustrer ses réflexions, le pape raconte l’histoire de Ruth et Noémi, du livre de Ruth (Ancien Testament) : Noémi, « âgée, après la mort de son mari et de ses enfants, invite ses deux belles-filles, Orpa et Ruth, à retourner chez elles dans leur pays d’origine. … Comme tant de personnes âgées aujourd’hui, Noémie craint de rester seule, mais elle ne peut imaginer autre chose. Elle est consciente que, veuve, elle a peu d’importance aux yeux de la société et elle est convaincue d’être un fardeau pour ces deux jeunes qui, contrairement à elle, ont toute la vie devant elles. »
À ce moment, écrit le pape, « le récit biblique nous présente deux options différentes face … à la vieillesse » : « L’une des deux belles-filles, Orpa, qui aime aussi Noémi, l’embrasse avec affection, mais accepte ce qui lui semble être la seule solution possible, et elle s’en va. Ruth, par contre, ne se détache pas de Noémi et lui adresse des mots surprenants: ‘Ne me force pas à t’abandonner.’ »
Selon le pape, « Ruth nous enseigne, à nous qui sommes habitués à l’idée que la solitude est un destin inéluctable, qu’à l’invocation “ne m’abandonne pas!” il est possible de répondre “je ne t’abandonnerai pas!”. Elle n’hésite pas à renverser ce qui semble être une réalité immuable: vivre seul ne peut être l’unique alternative! » Le pape souligne que « ce n’est pas par hasard si Ruth – celle qui reste proche de Noémi âgée – est une ancêtre du Messie (Mt 1, 5), de Jésus, l’Emmanuel, celui qui est le “Dieu avec nous”, celui qui apporte la proximité de Dieu à tous les hommes, de toutes conditions, de tous âges ».
Le pape François nous encourage à suivre les « pas » de Ruth : « Mettons-nous en route avec cette jeune femme étrangère et avec la vieille Noémi, n’ayons pas peur de changer nos habitudes et d’imaginer un avenir différent pour nos personnes âgées. » Il rappelle que Ruth qui « a choisi de rester près de Noémi », « a été bénie: par un mariage heureux, une descendance, une terre ». « Cela vaut toujours et pour tous, affirme le pape: en étant proches des personnes âgées, en reconnaissant le rôle irremplaçable qu’elles ont dans la famille, dans la société et dans l’Église, nous recevrons nous aussi de nombreux dons, de nombreuses grâces, de nombreuses bénédictions! »
Photo: Noémie et ses belles-filles (1960), Marc Chagall (1887–1985)