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Réflexions dominicales : le vrai Roi d’un monde vrai, par Mgr Follo

Photo : © 2024 Amis du Saint-Siège à l’UNESCO

Ancien observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’UNESCO (2002-2021), journaliste, professeur de philosophie et d’anthropologie culturelle, Mgr Francesco Follo réfléchit sur les textes bibliques du dimanche 24 novembre 2024 – Solennité du Christ Roi – dans son blog Riflessioni domenicali.

Mgr Follo souligne que « la Royauté du Christ est complètement soumise aux exigences de la vérité » et que ce « mot » « indique, dans le langage de l’évangéliste Jean, la vérité de Dieu, son Amour pour l’homme, sa tendresse pour chaque homme ». 

« Le Christ, explique-t-il, s’offre comme parole de vérité prononcée par Dieu lui-même, comme réponse à toutes les interrogations du cœur humain, à nous tous, affamés de la vérité sur Dieu, sur l’homme et sur le monde. »

Voici les réflexions de Mgr Follo :

XXIVe Dimanche du temps ordinaire – Année B – Solennité du Christ Roi de l’univers (Rite Romain)
1Dn 7, 13-14 ; psaume 92 ; Ap 1,5-8 ; Jn 18, 33-37

Roi, non de l’autre monde, mais du vrai monde

Jésus n’est pas seulement Roi d’un royaume différent, c’est un Roi différent qui a comme but de servir la vérité de la charité, vérité qui rend libre. En fait, l’exercice de sa royauté ne nous rend pas esclaves, ne nous fait pas devenir des « sujets » selon le mode humain, mais Il nous élève vers Lui, Il nous fait participer à Sa vie-même. « La Royauté du Christ est le contraire du pouvoir, elle est service, elle est un don de soi jusqu’à la mort » pour nous donner la vie (Maurice Zundel).

Dans l’Évangile d’aujourd’hui, Ponce Pilate demande au Christ s’il est Roi. Le Christ lui répond : «  Je suis Roi : Je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. » Donc, la Royauté du Christ est complètement soumise aux exigences de la vérité, mot qui indique, dans le langage de l’évangéliste Jean, la vérité de Dieu, son Amour pour l’homme, sa tendresse pour chaque homme. Dans son débat bref et intense avec Pilate, Jésus affirme une autre chose importante :  » Tout homme qui appartient à la vérité écoute ma voix. »

Pour comprendre la Royauté de Jésus et participer à son règne (on pourrait ajouter pour annoncer et fêter ce royaume), il faut avoir choisi la vérité. Mais qu’est-ce la vérité ? C’est le Christ.

Jésus Christ est le seul homme de toute l’histoire humaine qui a dit : » Je suis la vérité » (Jn 14,6). Et, le Christ s’offre comme parole de vérité prononcée par Dieu lui-même, comme réponse à toutes les interrogations du cœur humain, à nous tous, affamés de la vérité sur Dieu, sur l’homme et sur le monde. Il s’offre comme Parole qui non seulement a créé le monde, mais aussi qui le régit. Il en est le Roi, un Roi à connaître non seulement avec la raison, mais aussi avec le cœur. Saint-Augustin a eu bien raison d’écrire : « On n’entre dans la vérité si ce n’est qu’à travers la charité ».

Le Christ est témoin royal de la vérité parce qu’il régit l’homme et le monde de manière authentique en les soutenant. Il ne les domine pas, il ne les gouverne pas avec le sceptre et le trône, au contraire, son trône est la Croix, vrai signe d’amour infini.  Son sceptre n’est pas un bâton de commandement mais c’est toujours la Croix qui devient un « bâton pastoral », par lequel il guide ses « petits agneaux » et les corrige[1] non parce qu’il les punit mais parce qu’il les porte sur ses épaules. C’est-à-dire qu’Il régit ses agneaux en les soutenant avec et sur Ses épaules.

L’exemple suivant explique aussi Sa façon de régner :

À Munich (Allemagne), sur le mur d’un hall d’une maternité, ces mots sont écrits en grands caractères :

« La main qui bouge un berceau, bouge le monde entier ».

Chacun de nous est un berceau symbolique et le Christ se charge du devoir maternel de le faire bouger de ses mains « royales » parce que nous devenons adultes en Lui par le rythme lent du temps.

Pour apprendre de Lui à régir et servir le monde de cette façon, prions souvent le psaume 84(85), versets 11 et 12 : « miséricorde et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent. La vérité germera de la terre et du ciel se penchera la justice« , alors, nous aurons ainsi un monde vrai. Nous aurons un monde nouveau dans lequel l’Amour de Dieu et sa fidélité se manifesteront. Nous aurons un monde où la vérité germera dans un printemps renouvelé et où la justice se manifestera du ciel pour commencer son chemin au milieu de l’humanité.

La Royauté du Christ est source de miséricorde, fait éclore la vérité, fait fleurir la Justice et fait resplendir la paix. Saint-Augustin écrit : » la vérité vient de la terre : Le Christ qui a dit « Je suis la vérité » (Jean 14,6), est né d’une vierge. Et la justice s’est manifestée du ciel : qui croit en Celui qui est né ne se justifie pas par lui-même mais il est justifié par Dieu. » La vérité est venue de la terre parce que le Verbe s’est fait chair » (Jean 1,14). Et la justice s’est manifestée du ciel : « parce que chaque grâce excellente et chaque don parfait descendent d’en-haut » (Jc, 17).  » La vérité est venue de la terre » c’est-à-dire qu’elle prit un corps par Marie » (Saint-Augustin, discours, 185,2).

Témoin de la vérité

En montant sur la croix et en y mourant, le Christ n’a pas été vaincu par le monde. Il l’a conquis avec son amour. Il a introduit dans le monde un vrai Royaume : la Seigneurie charitable de Dieu dans les cœurs des hommes. Grâce au Christ, l’amour divin a trouvé sa maison sur la terre : dans les cœurs des pauvres, des enfants, des miséricordieux, dans les cœurs purs – des Saints, de ceux qui ont été canonisés et de ceux que seul le cœur de Dieu connaît.

Tous ces derniers, – et nous avec eux -, forment un Royaume dont on voit au moins des petites parties. Tous comprennent que ces « Saints » ne désirent pas conquérir le monde afin de l’utiliser avidement et ne s’organisent pas pour construire une puissance mondiale. Ils veulent faire régner l’Amour du vrai Dieu dans le monde et sur le monde.
On pourrait objecter que ce message de Dieu est abstrait et que l’homme ne peut le comprendre, que la présence Royale du Christ est peu concrète. Mais dans l’Évangile d’aujourd’hui, Jésus redit à nouveau :  » je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité et tout homme qui appartient à la vérité écoute ma voix. »

Tout homme veut dire tous et pas seulement ceux qui ont étudié le catéchisme ou ont écouté les sermons, les conférences ou ont étudié la théologie. Christ Roi se fait écouter et comprendre par tous en disant des paroles de pardon lorsqu’Il est sur la croix. Chacun de nous peut écouter cette voix de vérité qui affirme que seul l’Amour peut donner un sens à notre vie. Et nous, les chrétiens, nous n’avons pas le monopole de cette vérité, nous avons le devoir de continuer à porter dans le monde, le témoignage de cette vérité qui devient pardon et ce, explicitement et consciemment.

Pour être témoins de la vérité comme le Christ, récitons souvent la prière du « Notre Père » en demandant intensément que « vienne le règne de Dieu » : si Sa Seigneurie s’affirme non seulement au ciel, mais aussi sur la terre, le cœur de Dieu battra au milieu de ce monde sans cœur.

Un signe de reconnaissance de la Royauté du Christ et de consécration au cœur de Dieu, représenté par le voile que les vierges consacrées reçoivent le jour de leur consécration.
Le voile est symbole d’intimité, symbole de virginité, symbole de consécration. Lorsque les vierges le reçoivent, l’évêque leur dit :  » Chères filles, recevez ce voile, signe de votre consécration ; n’oubliez jamais que vous êtes vouées au service du Christ et de son corps, qui est l’Église » (Rituel de la Consécration des Vierges, N° 25). Ce service est témoignage de vérité qui se propose au monde comme don de soi.

Dans le mythe païen d’Atlas, ce géant soutient le monde sur ses épaules. Il le fait contre son gré parce que c’est une punition du fait de sa révolte contre Jupiter.
Au contraire, Jésus-Christ veut aller sur la croix par obéissance amoureuse au Père et par la croix il soutient le monde en l’aimant, et en manifestant l’amour infini et tendre de Dieu pour l’humanité entière. La croix du Christ est le point ferme au milieu des changements et des bouleversements du monde. La vie du Chrétien participe de la stabilité de la croix qui est celle de Dieu, de son amour fidèle. En demeurant fermement unis au Christ, comme les sarments à la vigne, nous aussi, nous sommes associés à Son mystère du salut comme la Vierge Marie qui était auprès de la croix, unie à son fils, règne aujourd’hui dans la même oblation d’Amour.

Se convertir à cet Amour

Le deuxième dimanche de l’Avent ambrosien nous invite à être Fils du Royaume en nous convertissant à cet Amour vrai. Le péché de l’homme est qu’il pense être vrai sans Dieu et qu’il vit en étouffant son cœur. La conversion pour vivre l’Avent consiste à retourner vers l’Amour du Père en demandant pardon et nous laissant aimer par l’Amour exigeant de Dieu.
Convertissons-nous parce que nous pourrons être parmi ceux auxquels le Christ Jésus dira :  » Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : ‘Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde. » (Mt 25,34)


Note sur le voile

La symbolique du voile a des origines anciennes et est employée dans l’Art Chrétien aussi pour mettre en valeur les enseignements dogmatiques. Le voile est symbole du ciel. Souvenons-nous du rideau (voile) du Temple, tissé par Marie selon les apocryphes, qui se déchire au moment de la mort de Jésus (Mt 27-51, Mc 15,38, Lc 23,45). Et cette « ouverture » du voile signifie que la mort du Christ ouvre la voie vers le Saint des Saints, vers la Jérusalem Céleste à tous les hommes.

Le symbolisme du voile est étroitement lié au culte marial : le fidèle entre dans le royaume de Dieu « en pénétrant au-delà du rideau du Sanctuaire, la chair du Christ« , comme écrit Saint-Paul (He 10,20) et c’était sa mère, Marie, en qui le Verbe se fit chair.

Étymologie de « Roi » :
 – du verbe latin regere : soutenir, gouverner, dominer, donc la personne qui soutient, gouverne, domine.

[1] (« Corriger » vient du latin « regere cum », c’est-à-dire « redresser, améliorer, guérir »)




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