Light
Dark

France: canonisation des 16 carmélites de Compiègne

Photo : © eglise.catholique.fr

Anita Bourdon

Le pape François a étendu à l’Église universelle le culte des 16 carmélites de Compiègne, guillotinées sous la « Grande Terreur », en 1794: le pape a décidé de leur canonisation « équipollente », a annoncé la Salle de presse du Saint-Siège mercredi 18 décembre 2024.

Le Vatican indique en effet qu’au cours de l’audience accordée au cardinal Marcello Semeraro, préfet du Dicastère pour les causes des saints, le pape François a approuvé les votes favorables de la session ordinaire des cardinaux et des évêques, membres de ce dicastère, et il a décidé d’étendre à l’Église universelle le culte de la bienheureuse Mère Thérèse de Saint Augustin (née : Marie-Madeleine Claudine Lidoine) et de ses 15 compagnes de l’Ordre de carmélites déchaussées de Compiègne, martyres, tuées en haine « de la foi », selon l’expression technique, le 17 juillet 1794, à Paris (France), en les inscrivant au catalogue des Saints (canonisation équipollente) : aucun « miracle » n’est alors nécessaire pour la canonisation. Pour leur béatification, en 1906 par le pape saint Pie X, le martyre avait suffi, comme c’est la règle en cas de martyre.

Pour un « apaisement de notre mémoire française »

Les carmélites de Compiègne « sont devenues le symbole de la haine antireligieuse qui a sévi en France pendant la Révolution et des excès de la Terreur », écrit Xavier Sartre pour Vatican News.

Il rappelle que le président de la Conférence des évêques de France, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, avait présenté au pape, en 2021, la demande de la poursuite de leur processus de canonisation au nom des évêques des France.

De passage à Rome le 18 décembre, il s’est réjoui, au micro de Radio Vatican, de la canonisation équipollente de ces figures importantes de l’histoire de France, magnifiées par Georges Bernanos et son « Dialogue des Carmélites » (1949) inspiré de « La Dernière à l’échafaud » de Gertrud von Le Fort, écrit à partir de notes de Marie de l’Incarnation, ou Francis Poulenc et son opéra « Dialogue des Carmélites » (1957), et le cinéma, avec plusieurs films (1960, 1984, 1987, 1999). Pour l’archevêque de Reims, « les carmélites de Compiègne sont de belles figures de la liberté chrétienne à vivre jusqu’au bout dans différentes circonstances historiques »: « Pour ma part, j’espère que cette canonisation contribuera un peu à un apaisement de notre mémoire française qui doit assumer des violences qui ont été dans notre histoire et qui font parties de celle-ci, mais à travers lesquelles des témoignages de foi, d’espérance et de charité ont été données, qui font aussi parties de la beauté de l’histoire française. »

Radio Vatican résume l’histoire de ce martyre collectif: « Contraintes de quitter leur monastère le 14 septembre 1792, en pleine vague anticléricale, elles trouvent refuge dans des localités différentes et doivent revêtir des habits civils, le port des habits religieux étant interdits par les nouvelles autorités.

Peu après, mère Thérèse de Saint-Augustin propose aux sœurs de sa communauté d’offrir leur vie pour le salut de la France.

Le 27 novembre de la même année, elles prient un « acte de don de soi » écrit par la prieure, plus tard complété par une intention pour que les exécutions au moyen de la guillotine et pour la libération des personnes incarcérées.

Avec l’entrée en vigueur de la Terreur, les carmélites sont dans le viseur des révolutionnaires. Leurs logements sont perquisitionnés le 21 juin 1794, elles sont arrêtées le lendemain, accusées de poursuivre leur vie consacrée et de sympathie pour la monarchie.

Le 12 juillet elles sont transférées à la prison de la Conciergerie. Le 16, elles célèbrent la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel, élevant des hymnes de joie et profitent de ces quelques jours d’incarcération pour reprendre leur vie communautaire. Elles sont jugées le 17 et exécutées le même jour sur le site de l’actuelle place de la Nation.

Sur le trajet les menant à l’échafaud, et alors qu’elles montent les unes après les autres les marches vers la guillotine, elles chantent des psaumes, entonnent le Veni creator renouvelant leurs vœux avant d’être décapitées. Leur dignité et leur dévotion lors de leur exécution imposa le silence à la foule impressionnée. »

Leurs corps furent enterrés au cimetière de Picpus dans une fosse commune, où ils se trouvent encore dans le jardin des religieuses.

Le site de l’Église catholique de France publie cette prière de 2020 de Mgr Jacques Benoit-Gonnin, évêque de Beauvais, diocèse dont Compiègne fait partie:

Dieu notre Père,

Tu as tellement aimé le monde

que tu lui as envoyé Ton Fils Jésus,

pour qu’Il lui apporte le salut et la paix.

Dans la situation où nous nous trouvons aujourd’hui,

et devant les défis que doit relever l’Église de ton Fils,

encouragés par le témoignage des Bienheureuses Carmélites de Compiègne,

nous implorons Ton intervention :

qu’advienne la paix dans l’Église et dans le monde,

et qu’une force d’amour renouvelée

anime l’existence de tous tes enfants.

Amen.

D’autres canonisations équipollentes

Jean-Paul II a eu recours à ce type de canonisation une fois, en 1995, pour la canonisation du saint jésuite et martyr hongrois Étienne Pongrácz (1582-1619), né en Roumanie et mort en Slovaquie, et de ses compagnons Marc Križevčanin, prêtre croate, et un autre jésuite, polonais, Melchior Grodziecki.

Benoît XVI a utilisé cette procédure en 2012, pour Hildegarde de Bingen, proclamée sainte le 10 mai 2012. Le pape François l’a utilisée six fois déjà : Angèle de Foligno le 9 octobre 2013, Pierre Favre le 17 décembre suivant, José de Anchieta, sœur Marie Guyart, Mgr François de Montmorency-Laval le 2 avril 2014, et Mgr Bartolomeu Fernandes.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *