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France: Mgr Touvet nouvel évêque de Fréjus-Toulon, après la démission de Mgr Rey

Photo : © 2025 Diocèse de Fréjus-Toulon

Gabriel Klum

Le pape François a accepté la renonciation à la charge pastorale du diocèse de Fréjus-Toulon (France) présentée par Mgr Dominique Rey, indique la Salle de presse du Saint-Siège, en italien, ce mardi 7 janvier 2025. L’évêque coadjuteur, Mgr François Touvet, lui succède, ajoute la même source.

Communiqué des évêques de France

Pour sa part la Conférence des évêques de France (CEF) indique qu’elle a appris, ce même 7 janvier, « que Monseigneur Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, avait remis sa démission au Saint-Père, et que celui-ci l’avait acceptée ».

Si l’on comprend bien, tout s’est passé entre Rome et Mgr Rey, sans que la CEF ait été au courant de ce changement, ce qui peut apparaître étonnant par rapport à l’esprit de la « synodalité » promue par deux synodes.

« Nommé évêque coadjuteur du diocèse depuis novembre 2023, Mgr François Touvet devient donc, à compter d’aujourd’hui, évêque de plein exercice de Fréjus-Toulon. La CEF souhaite une belle nouvelle étape pastorale au diocèse de Fréjus-Toulon et à ses fidèles », précise le même communiqué.

Âgé de 72 ans, Mgr Rey a ainsi présenté sa démission au pape François le 31 décembre dernier et le pape vient de l’accepter. Mgr Rey devient donc « évêque émérite » de Fréjus-Toulon trois ans avant la limite d’âge de 75 ans pour l’exercice d’une charge épiscopale. Il avait succédé à Mgr Joseph Madec en l’an 2000. Il est membre de la Communauté de l’Emmanuel. Il était présent à Ajaccio lors de la visite du pape François en Corse le 15 décembre dernier.

Mgr Rey rappelle l’histoire récente

Pour sa part, Mgr Rey rappelle, sur le site du diocèse de Fréjus-Toulon (https://frejustoulon.fr/demission-de-mgr-dominique-rey-de-sa-charge-deveque-du-diocese-de-frejus-toulon/ ) les événements récents: « Après la visite fraternelle du cardinal Aveline, qui a été suivie de la visite apostolique conduite par Mgr Hérouard et Mgr Mercier, le pape a nommé, il y a un an, Mgr François Touvet comme évêque coadjuteur à mes côtés. Il a confié à ce dernier des facultés propres de gouvernement, dans les domaines de la gestion économique et immobilière, de l’accompagnement du clergé, de la formation des séminaristes, et du suivi des communautés au sein du diocèse. Juste après cette nomination, au cours d’une audience privée le 23 décembre 2023, le pape m’avait encouragé à assumer cette collaboration dans un esprit fraternel, et à ne pas démissionner ».

Il explique ensuite que le pape François l’a invité à présenter sa démission de sa charge pastorale: « Au terme d’une première année où la suspension des ordinations a été levée pour presque tous les candidats, le nonce m’a informé que le Saint-Père me demandait de déposer ma charge d’évêque diocésain de Fréjus-Toulon, sans que je n’aie eu connaissance d’éléments nouveaux par rapport à ceux qui avaient motivé la désignation de l’évêque coadjuteur ».

Il atteste de son obéissance au Successeur de Pierre: « Face aux incompréhensions, aux pressions, et aux polémiques toujours néfastes pour l’unité de l’Église, le critère ultime de discernement reste pour moi celui de l’obéissance au Successeur de Pierre. De même que je me suis toujours efforcé de répondre aux appels à la nouvelle évangélisation de saint Jean-Paul II, puis aux encouragements de Benoît XVI à accueillir et à former les vocations sacerdotales, enfin aux orientations de François, j’ai accepté, dans le cas présent, de remettre la charge pastorale qui m’avait été confiée en l’an 2000 par Jean-Paul II. »

Une dynamique missionnaire

Mgr Rey salue aussi la vitalité missionnaire de son diocèse: « Alors que j’atteins ma 25ᵉ année d’épiscopat au service du diocèse de Fréjus-Toulon, je rends grâce à Dieu pour les bénédictions et les fruits missionnaires que nous avons portés ensemble. Grâce à la mobilisation pastorale des paroisses, à l’apport des mouvements et des communautés de diverses sensibilités spirituelles, à la diaconie du Var, au rayonnement de la vie religieuse, notre diocèse a pu offrir un témoignage évangélique et une vitalité missionnaire reconnue En particulier, je suis profondément reconnaissant d’avoir vu tant de jeunes offrir leur vie pour le service de l’Église. L’Église varoise est belle de sa diversité et dynamique dans son élan pastoral. »

Il exprime sa gratitude : « Je tiens à remercier chaleureusement tous les membres du clergé, les consacrés et les fidèles laïcs pour leur engagement fidèle et généreux. Je continuerai à prier pour que cette communion missionnaire se déploie dans la fidélité à l’Évangile et l’amour de l’Église. »

Enfin, Mgr Rey annonce une messe d’adieu, le 1er février prochain: « Ayant remis ma démission au Saint-Père, je célébrerai une messe d’action de grâce le samedi 1er février à 10h30 au domaine de La Castille. Vous y êtes tous conviés. Que Dieu vous bénisse. »

Les interrogations de Rome

Différents événements semblent avoir conduit le pape François à solliciter cette démission.

En mai 2022, après la mission conduite par Mgr Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, dont le diocèse de Fréjus-Toulon est « suffragant », le Vatican avait suspendu l’ordination de quatre prêtres et de diacres. Un des ordinands avait commencé sa formation dans un séminaire du Paraguay fermé sur décision de Rome, avant d’être accueilli au séminaire de La Castille à Toulon. Des interrogations avaient été soulevées sur le recrutement des séminaristes venus d’autres diocèses d’autres pays.

En février 2023, l’évêque étant mis en cause pour sa « gouvernance », une « visite apostolique » du diocèse a été confiée à Mgr Antoine Hérouard, archevêque de Dijon, et Mgr Joël Mercier, ancien secrétaire – « numéro 2 » – de la Congrégation romaine pour le clergé.

Le pape a ensuite nommé Mgr François Touvet comme évêque coadjuteur pour seconder Mgr Rey. La visite avait relevé notamment des « dysfonctionnements » économiques et un accueil trop large de « communautés nouvelles ».

Trois exemples de l’accueil de communautés

En 2001, Mgr Rey avait accueilli dans son diocèse des sœurs de « Points-Cœur ». En 2008, il avait incardiné Thierry de Roucy et il avait reconnu canoniquement les différentes branches de sa fondation de « Points-Cœur ». Il a aussi ordonné prêtres des séminaristes de Points-Cœur formés en Argentine, au Chili ou au Collège anglais de Rome: un manque de contrôle des parcours de formation a été épinglé. Et, en février 2016, Mgr Rey a dû déclarer Thierry de Roucy « suspens a divinis », ce qui lui interdisait d’exercer tout sacerdoce, et ceci pour « manquement caractérisé » à son devoir d’obéissance. Point-Cœur a été dissout en 2020 et subsiste comme une ONG humanitaire. Condamné en 2011 par le tribunal ecclésiastique de Lyon, pour « abus sexuel, abus de pouvoir, et absolution de la victime », Thierry de Roucy a été renvoyé de l’état clérical en 2018 et… radié de la Légion d’honneur.

En 2003, Mgr Rey avait reconnu comme « association publique de fidèles » la Fraternité Eucharistein, épinglée par la suite pour des dérives de fonctionnement. Le fondateur, le p. Nicolas Buttet, avait été ordonné prêtre sans un parcours classique dans un séminaire et il exerçait son sacerdoce en Suisse, loin par conséquent de la supervision de son évêque. Une visite canonique a déploré « un système pyramidal, abusif, infantilisant et qui a annulé les personnes dans les diverses dimensions de leur être, en particulier leur psychologie ». Nicolas Buttet a été relevé de ses vœux religieux par Mgr Touvet, et il a quitté la communauté Eucharistein en janvier 2024. Il resterait incardiné comme prêtre dans le diocèse de Fréjus-Toulon

Autre événement qui suscita des interrogations: un Australien, Alcuin Reid, était responsable du « monastère Saint-Benoît » de Brignoles composé de trois moines qui célébraient les offices selon le rite « extraordinaire » et ce « monastère » avait été reconnu comme association de fidèles par le diocèse de Toulon. Mais Mgr Rey avait refusé l’ordination à Alcuin Reid qui la demanda à un autre prélat et la reçut dans la clandestinité, à Rome, en avril 2022, un second moine étant ordonné diacre. Une désobéissance à l’évêque sanctionnée par une suspension et par la suppression de l’association, le 10 juin 2022. Néanmoins, le « monastère » continue d’exister et de recruter.

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